dimanche, juin 13, 2010

Pour l’amour de la littérature

A l’heure où que je vous cause dans l’Internet, l’Héritier a commencé le bachotage de son épreuve anticipée de français au baccalauréat.

Il se gave des centaines de pages de commentaires linéaires ou synthétiques, de notes et notules, exégèses et gloses dictées à stylo rabattu pendant toute l’année scolaire. Pas de perte de temps, les fiches du prof étaient prêtes depuis longtemps. Juste le temps de les dicter. Pas plus. Programme exigeant. Excellent prof. Bonnes fiches.

L’héritier sait désormais batifoler avec Pascal sur la circonférence dont le centre est nulle part, flirter avec Andromaque, patauger au bord du lac et faire la distinction entre le chiasme et l’anaphore. Il sait même disséquer Apollinaire, exercice dangereux car les poèmes sont comme les grenouilles : à trop les disséquer, ce qui reste n’est pas appétissant.

Il est juste de le reconnaître ; On lui a épargné le pire, les arts mécaniques et méprisables de la prise de notes, de la prise de parole en public, du mémo, de la synthèse, de la correspondance, du rapport, et on lui a inculqué une vertu ménagère bien utile, le sens de la parcimonie.

En effet, le petit (?) ressort de ses années de formation littéraire avec le sentiment irrépressible d’un ennui incoercible à la lecture des œuvres classiques. Il n’ira donc probablement pas gaspiller des sommes inutiles dans l’achat des volumes de la Pléiade ou des oeuvres complètes de Balzac (Ah La peau de chagrin …). C’est déjà ça d’économisé.

Il est, d’ailleurs, un vrai tour de force que d’en arriver là, si vite, vu que le petit, quand il était pas si grand, était un robuste et avide lecteur qui, en plus adorait la poésie. On te lui a vite corrigé cette malformation.

Pour ma part, j’ai retrouvé avec un plaisir vaguement sadique (confesserai-je), inchangées, les méthodes des profs de français de mon enfance. Faisons chier les mômes comme j’en ai chié, faut les dresser [En quoi le langage de Rabelais est-il une forme de révolte ?]

Tout juste si le langage de l'enseignant s’est grandement scientisé, si l’on peut dire ; il intègre désormais un jargon sui generis touffu et fortement teinté par le pathos linguistique et structuraliste tels qu'on t’en cause à l'université, histoire de faire croire que la langue est une science et de remonter l’estime, déjà haute, que l’inspection générale de lettres et la discipline ont d’elles mêmes. Boileau assassiné, quoi, mais savamment.

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